Faut-il un diplôme pour s’installer en agriculture ?

Dans le contexte où le Président de la République Monsieur Emmanuel MACRON en appelle à une simplification des normes et des contraintes administratives notamment à l’installation, penchons-nous sur l’installation en qualité d’agriculteur. Aspect sur lequel une simplification et une harmonisation ne serait pas un luxe.

 

Un diplôme n’est pas obligatoire pour s’installer en agriculture ou en viticulture 

En effet la profession d’agriculteur, ou de viticulteur n’est pas soumise de manière impérative à un diplôme comme peuvent l’être celle de médecin, avocat, notaire, pharmacien, expert-comptable … où un diplôme est indispensable à la pratique.

Vous pouvez vous installer et reprendre une exploitation sans diplôme, mais cela peut ne pas être une promenade de santé.

Le cumul des normes, leur complexité et l’arbitraire de l’administration départementale ou régionale peuvent entraîner rapidement une certaine phobie administrative, même chez les plus motivés.

 

La notion de diplôme entre particulièrement en compte dans l’obtention de l’autorisation d’exploiter et si vous souhaitez faire une demande d’aide à l’installation des jeunes agriculteurs :

La loi soumet obligatoirement à une demande d’autorisation l’installation des personnes qui ne remplissent pas certaines conditions de capacité professionnelle (avoir un diplôme) ou d’expérience au sens du R-331-2 du code rural. De plus si vous dépassez un certain seuil vous serez dans l’obligation de demander une autorisation préalable d’exploiter, même avec un diplôme. 

Le seuil est de : 35ha en Bretagne, 45ha en Pays de la Loire, 70ha en Normandie et 110ha pour le Centre-Val de Loire, ces seuils varient énormément en fonction des schémas et chaque schéma peut prévoir plusieurs seuils. C’est le cas par exemple pour les régions Nouvelle Aquitaine, Hauts de France. Mais le gagnant en termes de complexité est la région Occitanie avec 5 seuils différents dont deux sont à seulement 1ha d’écart. 

La Guadeloupe (10ha) et la Réunion (2ha) ont également leur propre seuil de contrôle des structures, pas de SDREA pour la Martinique. 

Attention ces seuils se voient appliquer des coefficients de pondération notamment en fonction de la nature de culture (1ha de serre ne vaut pas 1ha de vigne qui ne vaut pas 1ha de culture pris comme référence.) 

 

C’est le SDREA (Schéma Directeur Régional des Exploitations Agricoles) conformément au L312-1 du code rural  qui prévoit les rangs de priorité. Certains Schémas directeurs favorisent l’installation (avec capacité agricole) comme prescrit par le L331-1 al 2 du code rural d’autres mettent en avant d’autres priorités par exemple la proximité avec des bâtiments d’élevage. Aussi sans diplôme et ou expérience suffisante vous ne serez pas prioritaire, vous serez même dans la plupart des SDREA bon dernier. Cela ne signifie pas que vous n’aurez pas la possibilité d’exploiter mais vous pourriez dans le cadre de la demande d’autorisation d’exploiter perdre une partie des surfaces indispensables à votre projet. 

Attention certain SDREA sont plus exigeants que d’autres, ainsi dans certains pour avoir une priorité installation intéressante il faut réaliser en plus le parcours PPP qui doit être validé par le préfet (SDREA Bretagne). Ainsi dans cette région quelqu’un ayant un diplôme permettant l’installation dans les autres régions et qui ne réalise pas le parcours PPP se voit moins prioritaire (rang 10) qu’un agrandissement (rang 9). Dans certain SDREA les installations aidées peuvent être prioritaire à l’installation non aidée. 

Lorsque la demande d’autorisation sera réalisée auprès des DDT(M) une publicité aura lieu et toute personne peut solliciter une ou plusieurs parcelles. Si vous n’avez pas de diplôme et ou ne répondez pas à la définition régionale de l’installation alors vous risquez de ne pas être prioritaire, et de ne pas obtenir l’autorisation d’exploiter sur toutes les parcelles demandées. 

 

la demande des aides à l’installation des jeunes agriculteurs où le diplôme fait partie des préalables obligatoires (D343-4)  avec d’autre critère comme avoir moins de 40 ans ou faire un parcourt PPP. 

 

Comment reprendre et m’installer ?

Le R-331-2 du code rural et de la pèche maritime prévoit que pour répondre aux conditions de capacité ou d’expérience professionnelle il faut :  

Ou avoir un diplôme visé par l’article D 343-4  du code rural qui renvoie lui-même vers un arrêté du 18 février 2022 

Cet arrêté égraine un certain nombre de diplômes permettant de remplir ce premier critère. Cette liste de diplômes, va du baccalauréat professionnel à des diplômes d’étude supérieure comme ingénieur ou vétérinaire par exemple. Il faut noter que pour être dans cette liste les diplômes doivent être au minimum d’un niveau 4 européen. Les CAP et BEP sont de niveau 3 donc un BEPA (Le brevet d’études professionnelles agricoles) ne rentre pas dans cette liste est ne donne pas en ce sens la capacité. 

 

Niveau Européen  Diplômes
Niveau 3 BEPA, BEP, CAP
Niveau 4 Baccalauréat, BPREA 
Niveau 5 BTSA, BTS, Ancien DEUG… 
Niveau 6 Licence, Licence professionnelle, Maîtrise (M1) 
Niveau 7 Master (M2), diplôme d’ingénieur 
Niveau 8 Doctorat 

 

Ou avoir de l’expérience, ainsi répond aux conditions de capacité ou d’expérience professionnelle avoir 5 ans d’expériences, acquises sur une surface égale au tiers de la surface agricole utile régionale moyenne en qualité d’exploitant, d’aide familiale, d’associé exploitant, de salarié d’exploitation agricole ou de collaborateur d’exploitation le tout acquis sur les quinze dernières années. 

Attention dans les régions ou le SDREA est moins facilitant pour les installation, la capacité par l’expérience peut être difficile à faire valoir, toujours sur le SDREA BRETAGNE la capacité agricole par l’expérience n’est tout simplement pas reconnue puisqu’en rang de priorité 9 donc après les agrandissements de rangs 8.  

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Vous avez obtenu un diplôme agricole dans un autre pays que la France ?

L’article D 343-4 du code rural  vise également « un diplômes reconnu par un Etat membre de l’Union européenne ou par un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen conférant le niveau 4 agricole ». Il existe des disparités de traitement entre les régions ou départements, certaines se contentent d’une copie traduite du diplôme, à condition qu’il soit explicitement agricole et que le niveau européen soit clairement identifiable, d’autres exigent l’intervention de la DRAAF pour effectuer une reconnaissance du diplôme comme étant équivalent à l’un des diplômes à la liste des diplômes ci-dessus indiqué. 

 

 Si vous avez un diplôme hors UE ou hors EEE, vous devrez nécessairement passer par une reconnaissance en procédure DRAAF, cette reconnaissance nécessite un certain nombre de vérification qui peuvent prendre du temps. 

Pour illustration : dans le cadre d’un divorce par exemple Madame qui se sépare de son ex-époux. Elle souhaite s’installer seule dans une nouvelle exploitationElle n’a pas de diplôme de niveau 4 mais 10 ans d’expérience sur l’ancienne exploitation du couple, puisqu’elle a, par exemple sacrifier sa formation initiale et sa carrière au profit de l’exploitation du couple. En bretagne, son installation n’est pas prioritaire, elle est même dans les bas-fonds (priorité 9) du schéma après les agrandissements ou même les installations à titre secondaire. Elle gère pourtant conjointement une entreprise agricole depuis 10 ou même 15 ans. S’agissant de son âge, qu’elle est plus ou moins de 40 ans importe peu. Dans une région comme la Normandie ou en Loire Atlantique par exemple elle serait dans une priorité plus importante, sous les installations aidées mais au-dessus des agrandissements. 

Vous n’avez ni diplôme ni expérience agricole

Les connaissances et les techniques nécessaires à pratiquer la profession d’agriculteur sont importantes à la bonne réalisation d’un projet d’installation. S’il n’est pas impossible de réussir sans diplôme et expérience cela reste très difficile. La possibilité de reprendre un outil avec une équipe en place existe sur certain type d’exploitation, Vigne, Maraichage, légume … Si vous en avez les compétences, se concentrer sur la gestion et le management de ces équipes ou sur l’axe commercial pour les entreprises avec de la vente directe, peut être extrêmement efficient. En revanche ces entreprises clés en main et bien structurées sont plutôt rares et nécessitent un capital de départ important.  

L’absence de diplôme et/ou d’expérience pourrait vous pénaliser sur plusieurs points de votre projet :  

Comme déjà vu : si vous souhaitez demander les aides où le diplôme est obligatoire. Également Lors de la demande d’autorisation d’exploiter ou toute personne avec une capacité agricole pourrait vous être prioritaire en fonction des SDREA. 

Mais également en matière bancaire ou l’établissement de crédit peut avoir un doute sur la bonne conduite technique de votre entreprise. 

Bien évidement en matière de conduite de votre exploitation, ou un diplôme et de l’expérience sont primordiaux. 

En dehors de s’orienter sur une formation initiale traditionnelle qui est la voie classique dans la première partie de sa vie, il existe, pour des projets de reconversion, des solutions pour valider des diplômes donnant la capacité : 

Par une VAE , ou avec un diplôme non agricole d’un niveau suffisant pour passer des équivalences vous permettant de compléter les notions manquantes.  

Prévoyez environ 1 à 2 ans (ou 6 mois pour les plus acharnés), pour obtenir l’une de ces équivalences qui peuvent être réalisé à distance mais nécessitent un investissement en temps important. En fonction de votre situation professionnelle et familiale cela vous prendra un temps non négligeable. 

 

Louis-Guillaume Rebière - Responsable juridique

Titulaire d’un master II  en droit de l’agriculture et des filières agro-alimentaires et d’une maîtrise en droit privée, Louis est notre responsable juridique. En plus de sa formation, Louis est issu d’une famille d’agriculteurs et de viticulteurs, il maitrise donc bien les enjeux, les opportunités comme les difficultés du domaine. Depuis 2015, il accompagne les chefs d’entreprises dans leur parcours d’installation et de transmission, il met à profit ses compétences, son exigence et sa rigueur pour apporter des solutions adaptées et sécurisées à leurs besoins.

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Louis-Guillaume Rebiere

Responsable juridique